Arnaud Foussat

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Arnaud Foussat

VP, directeur scientifique de TxCell - Secteur Santé, Pharmacie, Biotech

Arnaud Foussat est depuis avril 2015 directeur scientifique de TxCell. Un poste hautement stratégique au sein d’une biotech spécialisée dans la thérapie cellulaire. Un domaine ou des avancées médicales majeures sont en cours.
 

NN : Pouvez-vous nous présenter TxCell ?               AF : TxCell est une biotech fondée en 2001 et basée à Sophia-Antipolis. Nous travaillons sur la thérapie cellulaire, une technologie née il y a une dizaine d’années qui est en pleine expansion depuis 2 ou 3 ans. Notamment grâce aux biotechs américaines qui obtiennent de très bons résultats sur le traitement du cancer. La différence par rapport aux médicaments classiques, c’est que nous n’utilisons pas de molécules chimiques pour traiter les patients. Nous prenons des cellules du sang, que nous allons « éduquer » pour qu’elles aient une action thérapeutique et ensuite les réinjecter au patient. Chez TxCell, nous travaillons sur un type cellulaire particulier que nous appelons les lymphocytes T Régulateurs. Ces cellules spécifiques ont des propriétés anti-inflammatoires et nous sommes pour ainsi dire les seuls industriels au monde à les travailler. Le but est de traiter des maladies inflammatoires chroniques, des pathologies auto-immunes comme la maladie de Crohn ou la sclérose en plaques. Des maladies en échec thérapeutique qui représentent un nombre de patients considérable.   NN : Qu’est-ce qui a changé pour vous avec ce nouveau rôle de directeur scientifique ? AF : Je suis passé de la gestion des équipes Recherche & Développement à un rôle plus stratégique. Désormais j’essaie surtout d’insérer TxCell dans un environnement compétitif, de multiplier les dépôts de brevets, de lancer de nouveaux projets, de nous permettre d’acquérir des technologies complémentaires et d’apporter de nouvelles idées qui seront ensuite développées par les équipes de R&D. Il y a toujours de la science, mais elle est moins expérimentale. J’interviens dans la conception, la définition même des nouveaux produits. J’en détermine les attributs : quelles caractéristiques possèdent-t-ils ? Comment agissent-ils sur le patient ? Quels sont leurs mécanismes d’action ? Grâce à quelle molécule ?   NN : Avec visiblement une grande liberté de décision ? AF : Oui et c’est extrêmement motivant. Nous créons notre propre domaine, même les régulateurs viennent nous demander notre avis sur les nouvelles lois en matière de thérapie cellulaire. Il est possible de garder un esprit libre et une grande créativité. Après évidemment nous ne travaillons pas sans contraintes. Il y a d’abord la réalité scientifique, ensuite il faut penser dans une optique de marché, notamment à l’adoption du futur produit par les médecins.   NN : Directeur scientifique est donc un poste clé au sein d’une biotech comme TxCell ? AF : Oui, car nous sommes dans un domaine ou la question de savoir si la science va réussir à faire le lien avec la médecine se pose encore. Les essais cliniques en matière de thérapie cellulaire vont généralement jusqu’aux phases 1 ou 2, il y a très peu de passage en phase 3 qui sert à démontrer l’efficacité du médicament. Donc les rôles comme les miens sont cruciaux. Peut-être que dans 10 ans les scientifiques seront moins impliqués dans la partie business, parce que tout le monde saura ce que c’est qu’un lymphocyte T et comment ça marche. Mais aujourd’hui il faut que l’on soit au cœur des discussions avec les investisseurs et les partenaires pharmaceutiques parce que leurs questions sont encore très liées à l’expérimentation et à la science. Voila pourquoi mon rôle est également d’avoir une connaissance parfaite de ce que l’on fait et de ce que font les autres en termes de thérapie cellulaire, au niveau académique comme industriel.   NN : La société a levé 8 millions d’euros en juillet dernier, comment cet argent sera-t-il dépensé ? AF : L’objectif est de financer la conduite des projets déjà en cours et notamment de nos 2 produits en développement. Le premier sur la maladie de Crohn où nous sommes en phase 2 et le second sur une maladie de l’œil qui s’appelle l’uvéite inflammatoire dont le premier essai clinique va démarrer dans le courant de l’année prochaine. A cela s’ajoute un aspect innovation sur les produits existants. Pour vous donner un exemple concret, ma première mission a été de mettre en place une plate-forme de lymphocytes modifiés génétiquement plus efficaces sur le traitement du cancer notamment. Cette levée va également nous aider à développer des partenariats et à créer de nouveaux produits pour le pipeline de TxCell.   NN : Comment expliquez-vous ces investissements de plus en plus importants sur les biotechs ? AF : La fin de la crise d’abord. C’est mécanique, il y a plus d’argent, les gens reprennent le goût du risque. C’est nécessaire pour nous, cela reste un investissement particulier car une biotech c’est une idée. Si elle fonctionne, ça va au bout, tout le monde gagne et la plus-value est très importante. Si elle ne fonctionne pas, tout s’écroule… Il n’y a pas de demi-mesure dans le domaine. Le retour des investisseurs est également lié aux avancées scientifiques et médicales. Les dernières avancées ont été spectaculaires. Il y a 2-3 sociétés aux Etats-Unis qui ont démontré qu’avec la thérapie cellulaire, des patients cancéreux avec quelques mois à vivre étaient presque guéris de leurs tumeurs. Avec des taux de 80% de réponse et avec des cas de rémissions  sur des  pathologies cancéreuses graves, chez l’enfant notamment. Ca a donné une impulsion incroyable à l’investissement dans le domaine de la biotech et en immunothérapie de façon générale. On a pu le voir à travers des sociétés françaises comme Innate Pharma à Marseille ou Cellectis à Paris qui sont récemment allées chercher des fonds aux Etats-Unis. Après la valorisation boursière s’accroit, des partenariats avec des sociétés pharmaceutiques voient le jour et ça permet de créer un cercle vertueux. Pour finir plus spécifiquement sur les thérapies cellulaires, les investissements arrivent car le besoin médical et le potentiel thérapeutique sont là. A partir de là, même si les développements coûtent cher, les barrières ne tiennent pas très longtemps. Pour nous dans 10 ans la thérapie cellulaire sera vue par les médecins et les patients comme un traitement classique.   Propos recueillis par David Rozec, drozec@nomination.fr